La financiarisation de la nature

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Rencontre/débats proposée par l’Université du Bien Commun

Avec Riccardo Petrella en visio (économiste et politologue), Francine Depras (sociologue), Harold Levrel (professeur d’économie écologique à AgroParisTech, Cired)

Ce programme est en cours de finalisation et est susceptible de s’enrichir. Evènement sur inscription

A /’Academie du climat, 2 place Baudover – 75004 Paris

=> Retrouvez le programme complet PDF en cliquant sur le lien : ICI 

Inscription indispensable : https://framaforms.org/universite-du-bien-communparis-la-financiarisation-de-la-nature-2-1697643847
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Avec Riccardo Petrella (en visio) économiste, politologue, ancien commissaire européen à la science et à la technologie, fondateur du groupe de Lisbonne, auteur de nombreux ouvrages dont Le bien commun, éloge de la solidarité (1997), cofondateur des Université du bien commun en Italie, Belgique et Argentine. Dernier ouvrage : Au nom de l’humanité, oser l’audace (éditions Couleur livres, Mons, 2017). Il est président de l’Agora des Habitants de la Terre.

Francine Depras sociologue, elle est administratrice du RéUniFEDD et de la Société Française de Prospective (SFdP) et y poursuit ses recherches sur les politiques territoriales et urbaines et de l’enseignement. Ses recherches portent plus particulièrement sur la transition écologique et les transformations sociétales. Elle travaille aussi depuis plusieurs années sur la comptabilité socio-environnementale et est membre de l’association CERCES (Cercle des Experts-Comptables Environnementaux).

Harold Levrel professeur d’économie écologique à AgroParisTech, Cired, co-auteur avec Antoine Missemer du livre L’économie face à la nature /De la prédation à la coévolution (éditions Les petits matins, 2023). Un livre en partenariat avec l’Institut Veblen pour les réformes économiques.

Combien vaut la forêt d’Amazonie ? Quelle est la valeur marchande de l’incessant labeur de pollinisation accompli par les abeilles? Des conservateurs de la nature et des économistes plaident pour donner une valeur aux services rendus par les

écosystèmes : eau potable, air de bonne qualité, pollinisation, absorption du CO2 par les forêtset les océans, diversité génétique-, partant du principe que des ressources gratuites et perçues comme renouvelables à l’infini seront mal protégées.

Si nous n’attribuons pas une valeur et ensuite un prix aux richesses naturelles et aux bénéfices que nous prodigue l’activité écosystémique, il nous sera difficile de les défendre, plaident certains. Cette démarche ne fait pourtant pas l’unanimité. En effet, réduire « les questions environnementales à des fonctions utiles uniquement à l’être humain, avec une vision très partielle, sans comprendre les interactions beaucoup plus larges » n’est pas viable, critique Aurore Lalucq, députée européenne

et co-auteure du livre Faut-il donner un prix à la nature. Fixer un prix ou une valeur « * ne garantit pas que tout le monde prenne des décisions pour la protéger », reconnait Mary Ruckelshaus, auteure du Natural Capital Project de l’Université de Stanford, qui prône des régulations publiques en la matière.

Avec la raréfaction des ressources naturelles et la disparition désormais inévitable de certaines espèces, la loi de l’offre et de la demande s’applique désormais aux «richesses» naturelles*. Depuis déjà plusieurs décennies, les biens communs naturels mondiaux attisent toutes les convoitises et se voient attribuer un rôle de premier plan sur les marchés financiers grâce aussi aux dispositifs économiques règlementaires destinés à les protéger. De tels dispositifs sont sensés servir de bouclier à leur dégradation sans pour autant parvenir à endiguer les agressions répétées dont ils font l’objet.

«Financiariser la nature pour la sauver ? Un nombre croissants de pays sont actuellement en train de mettre en place une comptabilité durable valorisant en termes monétaires la biodiversité et de nouveaux marchés sur la nature où se négocient des certificats biodiversité. Quels sont les avantages et limites de ces outils d’un point de vue environnemental, social et économique, quel rôle peuvent-ils jouer dans la lutte contre la 6ème extinction de masse des espèces ? », s’interroge Frédéric Hache.

Ce phénomène de financiarisation s’amplifie paradoxalement alors même qu’émerge en même temps, au nom d’une vision holistique du vivant, la conception d’une nature comme sujet de droit et « bien sans maître » depuis ces deux dernières décennies.

Ainsi, des banques et des fonds d’investissements achètent d’immenses zones naturelles riches en espèces animales et végétales menacées. Monétarisées et

financiarisées, ces réserves sont ensuite transformées en produits boursiers comme l’eau par exemple devenue une valeur boursière sur les marchés à rente à Chicago en décembre 2021 ; ou alors transformées en monnaie d’échange et de compensation afin que de gros pollueurs puissent s’acheter un droit de polluer.

Pratiques vertueuses ou dérives pernicieuses ?

Il est de plus en plus difficile de fermer les yeux sur les ambivalences de la notion de dette écologique qui est compatible avec le phénomène de monétisation de la nature. En conclusion serons-nous capables de concevoir la planète comme un milieu vital partagé dans le cadre duquel la nature ne peut être réduite à la somme des « services écosystémiques » utilitaires ou récréatifs qu’elle nous dispense ?

*Au 17eme siècle, le philosophe John Locke justifiait la propriété privée et les enclosures, les droits d’accès exclusifs sur la nature, par la valorisation que le travail humain apporte à cette dernière. Mais la nature n’était pas en soi un objet économique comme elle l’est devenue à la fin du 20ème siècle du fait de son caractère d’abondance et d’incommensurabilité. Du 17ème siècle à la première moitié du 20èmesiécle, deux types de colonisation puis de néo-colonisation ont marqué le développement du capitalisme (dont les deux innovations principales sont, selon André Gorz, l’invention de la concurrence et l’illimitation du temps de travail) : les conquêtes territoriales par les puissances coloniales occidentales et l’accaparement des ressources naturelles qui ont prospéré d’abord via l’esclavage puis le salaricat et une exploitation économique maquillée en missions civilisatrices. De ce point de vue les logiques extractivistes sont loin d’être une nouveauté.

Une nouvelle étape a commencé ensuite en juillet 1980 avec l’autorisation des droits de propriété intellectuelle par le Congrès américain à l’occasion du brevetage d’une bactérie mangeuse de pétrole. Puis au début des années 2000 est apparu le process de la biopiraterie, notamment avec les industries cosmétiques et pharmaceutiques pillant notamment les connaissances traditionnelles des peuples autochtones.

 

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