Sur le front des poubelles, on assiste à un rapport de force inédit. Une très large majorité de la population refuse ce système, mais les élus ont décidés d’offrir un front uni, solidaire face à ce refus.
Fi des différences, des tendances, des nuances politiques. Les élus des communes concernées font bloc et opposent la même obstination à ne pas entendre les arguments de leurs administrés.
Du jamais vu. Alors que l’on est habitué aux problèmes entre communes pour des questions d’entretien des routes, de déneigement, de limites territoriales, ou autres querelles antédiluviennes, nous assistons ici autour des poubelles à une union « sacrée », quasiment « contre nature ».
Tous unis pour défendre les poubelles à puce. Mais cette union pose bien des problèmes. On s’aperçoit en assistant aux réunions des Communautés de communes ou celles des communes, qu’au nom du principe de consensus, les discussions sont réduites parfois à un simple vote. Certes, trop de discussions nuit, mais plus de discussion, qu’est-ce que cela veut dire ? En ce qui concerne les poubelles, on apprend qu’au nom de ce consensus, les allers-retours légaux entre les délégués, les commissions et les communes ne s’est pas fait. Et les élus nous confirment qu’il n’y a pas eut de débat, pas même de rapport et donc le projet a été décidé en vase clos par le Sictom puis entériné par les Communautés de communes. On apprend que le projet a été présenté comme la seule alternative : il faut des bacs individuels à puce électronique, cette idée étant admise comme postulat, il ne restait aux délégués qu’à valider le marché. Certes, on comprend bien que d’aller de réunion en réunion soit fastidieux, contraignant. Mais n’est-ce pas le prix de la démocratie ? N’est-ce pas le rôle même des élus de décortiquer, analyser, critiquer, structurer, les idées des uns et des autres ? Ces consensus remettent en question le rôle même des élus et des collectivités territoriales. Le nom même de « collectivité » perd son sens. Et l’on s’aperçoit à l’usage que du consensus au dictat, il n’y a qu’un pas. Et sur la question des poubelles, ce pas a été largement franchit. Prenons pour exemple le village de Goudet, où le Maire, Marc Piguet, s’est trouvé quasiment bafoué par son adjoint et on l’on a vu les gendarmes intervenir contre la population, pourtant majoritaire. Prenons Dunière, où l’on a vu les gendarmes fouiller dans les poubelles déposées devant la mairie en protestation, pour relever les noms des manifestants. Et prenons globalement l’ensemble des élus qui, à quelques exceptions prêts, font la sourde-oreille à leurs administrés, aux arguments contre, sous prétexte que le projet a été voté et donc il ne sera plus remis en question. Cette histoire de poubelles a quitté depuis longtemps la simple sphère environnementale pour devenir un problème de démocratie, et donc un problème politique et l’on voit très clairement la population —j’allais dire la populace— face aux élus, face à la « classe politique ».
Et c’est ainsi que nos élus donnent raison aux théories de classes et font exister ici la classe politique.
Mais à la veille des élections municipales, on est en droit de se demander si ce front est si légitime, et combien de temps il résistera. Et rappelons nous l’histoire de nos institutions, l’histoire de nos collectivités. Ici en France, elles sont nées des luttes sociales, des revendications populaires, voire même des soulèvements.