A M. Le Préfet de Haute-Loire

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Lettre ouverte à M. Le Préfet de Haute-Loire,

Monsieur le Préfet de la Haute-Loire, Monsieur le Ministre de l’Intérieur,

Je tiens à vous faire part de mon indignation concernant votre refus de régularisation du jeune Madama Diawara. Ce dernier est passible d’une « obligation de quitter le territoire français ».
De quel territoire parlons-nous ?
En Haute-Loire, il y a une cinquantaine de jeunes dits « mineurs isolés ». Madama en faisait partie, il y a peu. Son entrée dans l’âge adulte, il a aujourd’hui 19 ans, ne le sort pas de la condition de jeune.
Ces jeunes sont une chance pour nous. Ils nous rappellent la chance que nous avons de vivre ici. Ils ont tant à nous apprendre, nous avons tant à partager avec eux.
A travers l’expulsion de Madama, quel message envoyons-nous à l’ensemble de la jeunesse ?
Pensez-vous que les jeunes vont subir ainsi sans un moment ou un autre se soulever ?
La jeunesse, toute la jeunesse, a besoin de considération et d’attention.
En portant atteinte à la sécurité de Madama, on porte atteinte symboliquement à celle de tout autre jeune.
A l’heure où l’on parle de résilience, comment l’Etat français peut-il faire si peu de cas d’une situation
humaine aussi douloureuse en répondant par une violence aussi brutale.
Il ne s’agit pas de « papiers » et d’âge exact de la personne. Nous ne pouvons accepter qu’une personne soit réduite à des papiers. Oui, c’est bien d’une personne dont on parle avant tout.
Pourquoi ajouter de la souffrance à la souffrance ? Imaginez ce que représente une expulsion pour ce jeune, ce quecela signifie psychiquement ?
Cette situation n’est pas digne de notre république, ne correspond pas à nos traditions, à nos valeurs et à notre identité française. La France, ce n’est pas ça.
Nous ne nous reconnaissons pas à travers votre décision et ses conséquences. Ce n’est pas ça la France, ce n’est pas ça la France que nous voulons. A l’heure où l’on prétend associer la société civile, il est temps que vous nous écoutiez. Vous représentez l’Etat, vous en êtes l’un des nombreux serviteurs et à ce titre vous devez nous représenter. Nous ne pouvons laisser faire n’importe quoi en notre nom. Quand bien même la loi vous y autorise, elle ne vous y oblige nullement.
Madama, accueilli par un couple d’enseignants depuis deux ans, risque de se retrouver au Mali, pays dont vous connaissez la situation politique, alors qu’en France, il devait effectuer un contrat d’apprentissage.
Ce jeune n’est pas isolé, il a des liens en France, il est accueilli par une famille. A sa souffrance s’ajoute celle de ses proches qui ont tissé des liens affectifs forts et ont accompagné ce jeune au quotidien.
Cette situation produit de la souffrance, de l’insécurité et de l’illégalité.
La présence de Madama dérange qui ? Fait peur à qui ? Menace qui ?
Nous vous demandons instamment de prendre une décision digne d’humanité et de permettre à Madama de s’épanouir en servant la France. Ainsi, vous servirez la France.

Michaël Faure

Auteur de « Voyage au pays de la double peine », éditions « L’esprit frappeur », 2000.

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