Lettre ouverte à mes amis, copains, camarades qui ont voté pour la peste noire

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Il est d’usage que dans un média, les journalistes ne parlent pas à la première personne. Parler de soi est une sorte de trahison de la déontologie.

Pourtant aujourd’hui je déroge à la règle. Tout le monde le dit et donc je n’innove pas : cette élection présidentiel marque un virage profond de notre histoire.

Au soir du premier tour, j’étais bien décidée à voter blanc, l’abstention étant impensable. Issue d’une famille très engagée depuis plusieurs générations, j’aurai le sentiment de la trahir si je ne votais pas.

La possibilité du vote blanc me semblait le bon choix. Pourtant aujourd’hui, ce choix n’est plus possible.

Au soir du 1er tour j’attendais une réaction comme au lendemain du 24 avril 2002. Nous étions des milliers dans les rues du Puy et partout en France à dire non au Front National. Nous étions des millions partout en France fraternellement parce que nous ne voulions pas la haine, la division et l’horreur que nous voyons pointer.

Mais cette semaine, je n’ai rien vu de tout cela. Et bien au contraire en discutant avec les uns et les autres, en écoutant la radio, en lisant les témoignages, les appels, je découvre avec horreur que tel délégué syndical ira voter pour «Elle», que tel responsable politique appelle pour Elle ou se rallie.

Et par dessous tout, vous mes copains, vous que je croyais mes amis, vous mes compagnons de lutte, vous m’avouer avec fierté que vous avez voté, vous m’envoyer des messages, SMS ou mail pour m’expliquer qu’Elle a raison d’être contre l’Europe, qu’Elle a raison qu’il y a trop de migrants, ou qu’il faut défendre la langue française. Qu’Elle est capable de remonter l’économie, «d’ailleurs il n’y a qu’à lire son programme, Elle l’a bien dit dans son programme». «Et puis y’en a marre de tous ces politiciens et ces journalistes tous pourris, et puis, et puis…»

Mais comment pouvez-vous croire un mot de ce qu’Elle dit ? Comment pouvez-vous ainsi oublier l’histoire ? L’histoire du Front National n’est que mensonge, racolage, poudre aux yeux. Oubliez-vous que le fondateur de ce parti était lieutenant en Algérie, tortionnaire notoire, bénéficiaire de la loi d’amnistie pour les anciens combattants, celui qui considère la Shoah comme un «détail» n’a pas changé et son parti non plus. On peut repeindre la rouille mais elle finit toujours par ressurgir.

Aujourd’hui les sondages donnent 38% d’intentions de vote ! C’est énorme. Comment pourrons-nous nous promener sereinement dans la rue ? Comment pourrons-nous encore nous fréquenter, boire un verre ensemble ?

A vous tous qui pensez voter pour Elle, ne vous laissez pas duper. Ce n’est que de la communication, de la pub. Elle vend son programme comme elle vendrait des savonnettes, des brosses ou n’importe quoi. Mensonges, bluffe, tromperie. Je pensais naïvement que l’histoire de la France était inaliénable, qu’à l’infini chacun se souviendrait des plus belles pages, de la résistance, que le mot «fraternité» gravé au-dessus de nos écoles avait imprégné nos esprits, nos gènes à tout jamais. Mais il suffit de quelques discours pour effacer tout cela, de quelques mensonges. Comment est-ce possible de croire un seul mot de ces discours, de ces textes frelatés ? Alors ressaisissez-vous. Ne permettez pas que demain nous nous méfions les uns des autres, nous ne puissions plus boire un verre, rigoler, refaire le monde ensemble. La fraternité est le bien le plus précieux. Ne suivez pas celle et ceux qui ne veulent que la haine, la division, la défiance.

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