Pas simple à comprendre, le Sictom Entre Monts et Vallées ! Il prend des décisions contradictoires, oublie d’informer les Mairies dont il dépend, oublie d’informer les habitants qui en sont les usagers, et finalement, tourne en rond.
Mais revenons un peu en arrière sur les épisodes précédents de ce feuilleton interminable.
Depuis 2010, fort d’une décision du Grenelle de l’Environnement, le Sictom a opté pour la mise en place d’une tarification incitative, accompagné d’un système de poubelles individuelles à puce électronique, anticipant sur la loi qui «devait» être votée et qui prévoit la mise en place de la tarification incitative pour 2015. Sitôt dit, sitôt fait, le Sictom signe un contrat pour une enquête de mise en place avec la société Plastic Omnium qui le convainc d’acheter 17 000 poubelles de diverses dimensions.
C’était sans compter sur la vigilance et la sagacité des habitants.
Le Sictom touche une population de 25 000 habitants, auxquels il faut ajouter les touristes, vacanciers, randonneurs. Selon le président de la Communauté de commune du Mézenc, sur son secteur, qui est le plus touristique et le plus visité de Haute-Loire, pendant la saison d’été (de mai à septembre), la population est multipliée par 5. Rappelons qu’en temps normal, les 2/3 des habitations sont des résidences secondaires, et que sur la population permanente, 60% sont des personnes âgées, voire même 70% pour certaines communes comme Freycenet-Latour, par exemple.
Aussitôt des associations d’habitants et des associations écologiques, telles que les Amis de la Terre, s’alarment non seulement du système mais également du nombre de poubelles commandées et du coût de l’opération (globalement 1 700 000 €). A l’occasion des réunions d’information organisées par le Sictom, de multiples problèmes apparaissent, et les habitants ne tardent pas à s’opposer clairement et à s’organiser. Ainsi naît le CVD (Collectif Valorisons nos Déchets) qui rassemble des milliers de personnes dans tous les villages qui refusent le système, refusent de prendre les poubelles, et demandent une valorisation des déchets, avec recyclage, compostage collectif, revente ou transformation des produits résiduels. Et depuis maintenant plus de 4 ans la situation ne s’est pas débloquée. La population continue à refuser massivement ces containers. On a vu certains élus user de moyens peu orthodoxes pour imposer de force le système, comme à Goudet, ou à Dunières, où cela a coûté son poste au maire de l’époque. Cette question pèsera pour les élections municipales et l’on voit des membres du CVD être élus dans de nombreuses communes. Sans parler de la «dissidence» des communes ardéchoises.
Aujourd’hui, la situation, toujours pas résolue s’est étrangement complexifiée.
Le Sictom, reconnaissant que ce système est loin d’être au point, décide de réétudier tout le processus. En premier lieu il décide de repousser la mise en place de la tarification puisque le gouvernement lui-même n’est pas en mesure de définir les champs d’application d’une loi inapplicable, donnant ainsi raison au CVD qui dénonce cela depuis 4 ans. Le Sictom décide également de suspendre le contrat avec Plastic Omnium, et les puces électroniques ne seront pas mises en activité.
Alors pourquoi y a-t-il encore des problèmes me direz-vous ? C’est bien là que le bas blesse. Etrangement, et contre toute attente, le Sictom a décidé de reprendre la distribution de ces fameuses poubelles. Cette fois les élus décident qu’ils passeront en force : ils enlèveront les bacs collectifs et ainsi les habitants seront contraints de prendre les containers individuels.
Et depuis 2 mois, plusieurs communes se sont mises à l’œuvre. Mais la résistance ne fléchit pas. Tracts, réunions publiques, refus, continuent de plus belle sur le plateau. Les questions qui se posent sont multiples. La première est pourquoi le Sictom ne dénonce pas le contrat ? On sait maintenant que l’enquête commanditée et payée (près de 300 000 €) n’a pas été menée correctement. Plastic Omnium s’est contenté de prendre la liste des habitants et d’estimer les besoins. On sait que les quantités de containers commandées ne correspondent en rien aux besoins réels. Il s’agit de remplacer 2500 containers collectifs par 17 000 bacs individuels. Les communes sont obligées de créer des emplacements pour déposer les poubelles. A St-Front, le maire annonce en avoir créé 92. Le Sictom a dû acheter en plus des serrures pour équiper ces poubelles (30 000 € supplémentaires), et également des «fanions» qui permettent de signaler le ramassage (46 000 €). Sans parler des puces électroniques devenues inutiles mais qui équipent quand même les bacs et qui ont été payées. A cela se rajoute des bacs collectifs à carte que le Sictom prévoit pour les touristes et les résidences secondaires (3000 € par bac).
Force est de constater que si la tarification incitative n’est pas en place —et visiblement, elle n’est pas prête de se mettre en place, puisque côté législation rien n’a avancé—, les bacs individuels ne servent à rien, les puces ne servent à rien, les serrures ne servent à rien, les fanions ne servent à rien.
L’idée était de limiter les quantités de déchets envoyées à l’enfouissement mais on se retrouve dans la situation inverse : sans garde fou, chacun peut faire l’usage qu’il veut de ces poubelles, les remplir avec tout et n’importe quoi, les faire collecter autant de fois qu’il veut. Et l’on risque fort de se retrouver avec un résultat inverse : les quantités de déchets qui explosent, des tournées de collecte qui n’en finissent plus. Par chance, le Sictom n’ayant rien expliqué à la population, celle-ci s’imagine que les puces fonctionnent et qu’elle sera sanctionnée en cas d’abus. Reste à espérer que la prise de conscience ne se ferra pas trop vite.
Question droit, la situation n’est pas moins inquiétante.
Avec ce passage en force, le Sictom se met dans une situation ambiguë. Il s’engage et engage la population dans un contrat dont on ne connaît pas les termes exacts. On ne connaît pas le coût de revient, on ne connaît pas le montant que chacun aura à payer, ni du côté du Sictom, ni du côté des communes, ni du côté des habitants. Flou inquiétant qui devrait alarmer les élus. «Le Sictom devrait dénoncer le contrat avec Plastic Omnium, et rendre les poubelles» soutient le CVD. En voulant éviter la confrontation sur un contrat avec Plastic Omnium, il s’engage dans une confrontation pour 17 000 contrats. Situation qui n’a pas échappé au CVD qui déjà alerte ses sympathisants.